Sur le tableau d’affichage, mon nom ne figurait pas parmi les admis. Pour la troisième fois, je venais d’échouer au baccalauréat. Pourtant, j’avais étudié comme une cinglée. À l’église, le prêtre avait même prié pour les candidats de la paroisse à quelques jours de l’examen. Le ciel n’avait pas exaucé les prières en ma faveur.
Orphelie habitait la même cour commune que moi. Elle aussi, avait composé. Elle n’avait que 18 ans, cette gamine, et n’était qu’à sa première tentative. J’imaginais un instant qu’elle ait décroché son diplôme. Fhum ! La honte pour moi ! Mes parents ne manqueraient pas d’utiliser son nom pour me savonner et me traiter de »vaurienne ». Vaurienne, peut-on l’écrire ainsi au féminin ? Ou doit-on dire toujours vaurien même quand ça concerne une femme ? Bref, je ne sais pas. Vous pouvez vérifier dans le larousse pendant que je continue mon récit.
Le résultat d’Orphelie m’importait beaucoup. Je lui téléphonai vers 16 heures :
-On dit quoi ma badé, ma voisine adorée. Tu as tapé BAC-là non ?
-Hum voisine, c’est maintenant que je me rends dans mon centre, oh. Je ne sais pas, mais je pars avec la foi que ça va marcher. Et toi, c’est comment à ton niveau ?
-Orphelie, j’ai échoué oh…
Ma voisine me consola au téléphone. Je courus aussitôt vers l’église. Au pied de la grotte de la vierge Marie, je m’agenouillai en lui adressant cette prière sonore :
« Sainte mère de l’immaculée conception, pour la troisième fois tu n’as pas permis que je décroche le baccalauréat. Pourtant je me fais vieille. J’ai 25 ans cette année. Orphelie, ma voisine, sept ans de moins que moi, vient directement de la classe de Première. Vas-tu permettre qu’elle obtienne son diplôme pendant que j’ai échoué trois fois consécutivement ? Sainte vierge Marie, je te prie de ne pas m’humilier de la sorte. Comment vont se sentir mes parents à l’égard de ceux d’Orphelie si jamais son examen marche ? Éloigne de nous cette honte, mère de Jésus, en faisant en sorte que ma prétentieuse voisine soit aussi confrontée à l’échec. Amen ! »
J’arrivai devant la cour vers 18 heures. Un monde fou à l’entrée. Des cris de joie. Que se passait-il ? À peine je m’approchai davantage qu’Orphelie fendit la foule en venant m’accolader :
-Mariette, ma jumelle, mon bac a marché oh ! Ça a marché !
Orphelie pesait beaucoup moins que moi. Tout en la soulevant en la faisant tournoyer comme une toupie, je la congratulai avec mon large sourire et ma voix ma plus émotive :
-Youpi ma jumelle ! Bravo bravo bravo ! Je suis très contente pour toi. Félicitations. Tu es bénie. Dieu est vraiment merveilleux !
Louis-César BANCÉ
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