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PLATEAU : UNE GRANDE FEMME MÉDECIN TOMBE AMOUREUSE D’UN DJÔSSEUR DE NAMA

PLATEAU : UNE GRANDE FEMME MÉDECIN TOMBE AMOUREUSE D’UN DJÔSSEUR DE NAMA

Ils étaient trois à m’aider à me garer sur un trottoir, non loin de la banque où je me rendais. Parmi le trio, il y avait un garçon dont la corpulence ne me laissait guère indifférente. Vous me traiterez certainement de folle, parce que je suis médecin, et lui, djôsseur de nama. Vêtu d’un débardeur blanc, ses bras valides, luisant de sueur, m’apparaissaient tel un miroir dans lequel se dessinait mon visage. Le jeune homme était beau. Je voyais tout son charme au delà de ses vêtements délavés et du soleil qui le carbonisait. J’aurais bien voulu qu’il me dise un mot, par-dessus le pourboire pour lequel il me pourchassait, ses amis et lui. En me regardant dans le miroir de ses muscles, je craignais qu’il ne pense que je lui serais inaccessible. Belle, la robe et le sac à main magnifiques ainsi que la voiture somptueuse, je faisais trembler les ministres. À fortiori un djôsseur de nama, j’imaginais !

           
Après mon opération bancaire, je me dirigeai vers mon véhicule, accostée par les trois parkingueurs.
– La vieille mère, c’est zoo, il faut sciencer, voici tes petits, me disaient-il en chœur.

        
Pour avoir un moment d’intimité avec le jeune homme qui me plaisait, je remis un billet de 5.000 francs à chacun des deux autres.
– Toi, en débardeur blanc, viens prendre ta part dans la voiture.

        
Heureux d’avoir reçu autant d’argent, les bénéficiaires se mirent à courir comme des footballeurs ayant scoré au cours d’un match serré. Je me retrouvai près de ma porsche cayenne, avec le beau djôsseur de nama.
– Comment tu t’appelles ?
– La vieille mère, c’est Abdoulaye.
   
          
Qu’est-ce qu’ils ont, ces jeunes, à appeler tout le monde vieille mère ou vieux père ? Qu’avait-il à créer un fossé entre lui et moi ? Ne sait-il pas que nous sommes faits de chair, comme eux, et que la différence du rang social est parfois absurde au cours d’un contact ? Le contact, je le voulais particulièrement chaleureux avec Abdoulaye. Familier. Je ne sais pas, mais j’avais l’impression d’être secouée par un coup de foudre.

– Enchantée, Abdoulaye. Je peux t’appeler Abdoul ? Ça fait plus raccourci et plus sexy, tu ne trouves pas ?
– C’est comme vous voulez, la tantie.

              
Voilà, il recommençait. De vieille mère, il me faisait non moins monter en grade en m’appelant tantine.
– Abdoul, je m’appelle Deborah. Tu peux m’appeler Debo, ça ne me gêne pas. Tiens ceci, c’est pour ton pourboire. Voici aussi ma carte de visite, appelle-moi quand tu veux. Je dis bien quand tu veux, je suis une femme célibataire, tu vois ? J’apprécie le fait que tu te battes dans la vie. À bientôt ?
– À bientôt, Debo.

       
Comme il apprenait vite les leçons !

      
Je démarrai ma voiture en laissant sur la voie, un Abdoul abassourdi, qui semblait comprendre que je lui tendais la main au delà de ce que son esprit ne pouvait imaginer. Je lui tendais bien plus que la main, je lui tendais mon cœur…💓

Louis-César BANCÉ

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